Le développement de l'Internet en France
Un outil de communication non identifié
Le nouveau média tisse sa toile
De nouvelles perspectives politiques
Les politiques mises en oeuvre pour développer Internet
Une reconnection des désenchantés de la politique
L'Internet entre en campagne dans la présidentielle de 2002
La pré-netcampagne
La net-campagne "officielle" des candidats
Les internautes entrent dans la campagne
L'"autre" netcampagne dans l'entre-deux-tours
Regards sur les Etats-Unis
2000: les débuts de l’Internet dans une présidentielle américaine
Les primaires 2003 et le « déclic » Howard Dean 
2004: l’ancrage de l’Internet dans la vie politique américaine
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Les relations avec l’internaute : s’informer, débattre, militer

Les sites de campagne de 2002 ont offert un large éventail de moyens de communication et d’information entre le candidat et les internautes. Les candidats ont presque tous rivalisés de moyens pour exploiter mieux l’Internet comme outil de relation avec le citoyen.

S’informer

Pour informer les internautes tout au long de la campagne sur le programme du candidat et ses réactions aux évènements, les candidats se sont engagés à faire vivre leurs sites au jour le jour. Sur le site de Jospin, 5 salariés et des dizaines de militants apportent leurs contributions en proposant sans cesse des reportages, des interviews et des comptes rendus, tous publiés exclusivement sur le site de campagne. Olivier Faure, le responsable du site, a affirmé que: «  Nous sommes les seuls à avoir pris le Web pour un vrai instrument de communication politique et non comme le simple appendice de la campagne sur terre. » Mais on note néanmoins que son programme était d’abord très difficile d’accès car il se présentait sous la forme d’un fichier PDF d’un mégabyte (long à télécharger à l’époque).

Chez Jean-Pierre Chevènement, un article nouveau par jour présente la position du candidat sur des sujets essentiels. On trouve des fiches argumentatives en mesure de transmettre en quelques secondes les différents éléments de son programme en plus d’une rubrique avec les positions thématiques du candidat.

Sur le site de Madelin un abécédaire fournit à l'internaute quelques déclarations sur des sujets précis sous forme de discours ou d’articles de presse révélant les prises de position du candidat. Un contenu trop pauvre selon certains commentateurs comme Place Publique...Chez Hue, c’est un « invente-ère » qui résume le programme du candidat qui invite les électeurs à discuter et contribuer à ces propositions et ainsi contribuer à l'élaboration d’un programme définitif.

Sur le site de Mamère, on ne trouve pas de programme clairement défini, mais à la place: une « bibliothèque » originale qui comprend des articles, des rapports, des propositions de loi et des points de vue critiques venant d’experts, de Mamère mais aussi des internautes ! Cette idée a été lancée alors qu’un forum était jugé infaisable aux dires de webmaster, Olivier Blondeau, notamment à cause de la situation tendue entre Lipietz et Mamère. Cette bibliothèque devait servir d’espace de démocratie participative servant les ambitions de Mamère qui affirmait que la politique se ferait autrement sur ce site, que les citoyens allaient contribuer à l’élaboration des idées et à la constitution du programme. Chaque jour Mamère répond aussi à des questions présentées sous la forme de carte tirées de manière aléatoires sur l’actualité, sa vie privée, les thèmes de sa campagne…

La vidéo a également été bien utilisée notamment par Bayrou (conférence de presse en streaming live, vidéos des déplacements) modestement par Chevènement et presque pas par Chirac. Le Pen a mis la vidéo et le son à l’honneur, expliquant qu’il s’agit de contrebalancer la " censure " dont le candidat du Front National serait victime à la télévision française. Mais c’est Jospin qui a mis en place le dispositif vidéo le plus ambitieux, il retransmet par exemple en direct les meetings et les réunions de son comité de soutien, ce qui lui a permis d’ironiser sur le fait que les meetings de Chirac sont « privés ».

Dans la catégorie des outils et instruments insolites, on peut noter François Bayrou qui propose le téléchargement gratuit de son dernier livre, et Chevènement qui propose à l'internaute de créer son adresse électronique sous la forme "…@chevenement2002.net ".

Mais la palme revient à Jospin avec son Monsieur Vouzémoi, personnage virtuel, qui commente avec humour l’actualité politique et que l’on peut s’envoyer par carte postale sonore. Par ce personnage interposé, Jospin fait passer ses réflexions sur Jacques Chirac et la droite.

Mais à part cela, les attaques des adversaires sont plutôt rares. Mais sur le site de Jacques Chirac le programme est présenté presque exclusivement en fonction du bilan du Premier ministre, a tel point que les propositions concrètes manquent, et la rubrique « droit d’inventaire » invite les internautes à dresser la liste de leurs « pires souvenirs » de Lionel Jospin.

Le plus acerbe est sans conteste Le Pen qui propose des fiches techniques consacrées à ses adversaires politiques: Chirac, Jospin, Madelin, Boutin, Chevènement et Mamère, comprenant une attaque de l'homme (ou de la femme) et un bilan de leurs années de pouvoir. Chirac par exemple, est présenté comme "l'homme de tous les retournements et tous les mensonges", et Jospin comme le "faux vertueux".

Débattre

En ce qui concerne l’interactivité, presque tous les candidats se sont lancés dans des chats. Lors de la Fête de l’Internet du 22 au 24 mars, Bayrou a lancé une vaste opération avec un stand de chat vidéo dans chaque région, Jospin a lancé un chat sur le thème de l’Europe, Chevènement sur la France dans le monde et Chirac aussi a pris rendez-vous avec la « génération internet » en se rendant à une soirée spéciale où les questions posées ont été tirées d’un forum de son site.

Mais en dehors de cet évènement, certains ont fait des efforts sur la durée. Bayrou avait son chat vidéo hebdomadaire mais non modéré, où le ton était bien différent que sur les forums modérés. Notons que sur le site de Bayrou, les internautes sont aussi invités à répondre à un sondage express sur des questions diverses. Madelin, grand amateur de chat, a mis sur pied une opération " 48 heures de dialogue non stop " et sur le site de Robert Hue, on peut régulièrement chatter avec des porte-parole spécialisés du candidat ou avec ce dernier en personne.

Dans la catégorie interaction, les forums sont aussi bien utilisés. Celui de Chevènement, est modéré quatre fois pas jour pour permettre aux interventions d’être mises en lignes rapidement. Sur le site de Chirac, chaque page a son forum en lien thématique avec le contenu. Les forums du site de Lionel Jospin sont limités à 24 heures et, fait original, modérés par un spécialiste et/ou des ministres connaissant parfaitement le sujet. Une synthèse est élaborée par ce dernier et, assure-t-on, remise à Lionel Jospin.

Les forums thématiques se retrouvent aussi chez Robert Hue qui lors de l’inauguration du site, promit que les questions ne seraient pas filtrées et appelle à la participation des intervenants à l’élaboration du « projet » en s’engageant à les entendre.

Le Pen est un des rares à ne pas avoir de forums sur sont site. D’après Romain Létang, on craignait que celui-ci ne soit « squatté rapidement par nos adversaires, profitant de cette fenêtre non pas pour débattre mais pour y proférer insultes à caractère racial ou autres pouvant nous entraîner vers de lourdes condamnations…C'est la raison pour laquelle nous préférons répondre de façon directe aux questions qui nous sont adressées et garder un contact moins virtuel avec les français. »

A part les forums et les chats, l’interactivité prend la forme plus simple de formulaires pré-établis pour écrire aux candidats par email. Chez Jospin, 15 personnes étaient entièrement affectées à répondre au mails du matin au soir, et ce n’était déjà pas suffisant aux dires du webmaster! Le webmaster de Bayrou prétend que celui-ci voyait les emails et donnait l’esprit de la réponse. Quant à Madelin et Jospin on leur remettait des synthèses des mails intéressants et d’après le webmaster de Madelin, les emails posant de « véritables questions » ont été utilisés pour reformuler les points obscurs du programme de Madelin ! D’après le webmaster de Noël Mamère, les emails augmentaient lors des apparitions du candidat à la télé et prenaient la forme de réactions à chaud à ce qu’il disait. Le même phénomène est constaté chez les autres candidats, preuve qu’il y a complémentarité entre la télévision et l’Internet !

Jouer

Les internautes sont aussi tentés par des jeux en ligne. Chirac propose un jeu-concours destiné aux enfants, " Dessinez la France de demain " avec cependant peu de contributions. Sur le site de Madelin on trouve plusieurs jeux, le kikadi qui comme on le comprend consiste à découvrir les auteurs de citations, et qui révèle subrepticement que les idées libérales professées par Madelin se retrouvent chez ses concurrents. Un autre jeu, la " Présidentielle poursuite ", consiste en une course à obstacles vers l'Elysée, dans laquelle l'internaute choisit quel candidat il incarne pour jouer, évalué selon son potentiel de blablatage et d’opportunisme…

Militer

Des espaces militants sont aussi créés sur le plupart des sites. On peut télécharger des tracts, des affiches, ou des bandeaux, trouver l’agenda de la campagne et des formulaires pour « réagir » ou pour « soutenir » le candidat de toute les manières possible : participation à un comité local, aux réunions publiques, distribution de tracts, collage d’affiches et soutien financier…Parmi les sites les mieux équipés, ceux de Chirac et Chevènement permettent de faire un don en ligne avec sa carte bleue.

Sur le site de Chirac aussi, l'internaute a la possibilité de manifester son accord sur un thème particulier en cliquant sur le lien « Je soutiens les propositions de Jacques Chirac sur … », il est alors invité à remplir un formulaire « pour mieux vous connaître, établir avec vous une relation privilégiée et notamment mieux vous informer » et qui est en fait une incitation à s'engager comme "e-volontaire", rencontrer un responsable local et recevoir la lettre d'information.

Plus révolutionnaire encore, on propose aux internautes de s’envoyer des tracts virtuels ou des e-cards, et sur le site de Chevènement, on est conseillé sur la façon de créer un site de soutien !

Aller vers "Comment mesurer l’impact de la netcampagne de chaque candidat ?"

 

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